juillet 2012

Labyrinthe : Le Prince

Le prince marchait dans la rue et les fidèles s’agenouillaient devant son humble présence. Il traversait de long en large la ville qui s’était faite si belle pour son arrivée. Il était l’homme de la situation et nul ne pouvait obscurcir son règne. J’étais témoin de son passage, incapable de comprendre comment il pouvait avoir régné si longtemps sur son peuple.

Le prince, d’un long mouvement d’épaule, rabattit sa cape, ce qui fit pour un instant briller le pommeau de son épée, legs de son père, souverain intemporel du royaume de l’oubli. Ici, il n’était pas question de changer quoi que ce soit. Le temps s’arrêtait pour les passagers des infinis. Il y avait des lustres que je marchais dans ses corridors sans fin. Le gouffre qui m’avait aspiré et m’avait emporté si creux au sein des couloirs que j’étais finalement arrivé au milieu de la capitale du royaume de l’oubli : Éternité.

Les bourgeois de la ville ne semblaient pas vouloir comprendre qu’au loin les murs du royaume s’effritaient dans de vastes mouvements de souffrance impitoyable. Alors que j’étais toujours fasciné par le passage du prince, j’eus une vision : son pas, son rythme, ses cheveux. Que pouvait-elle faire ici, celle-là même, raison de ma perte.

Le prince se baissa et d’un geste élégant lui fit signe de bien vouloir lui faire l’honneur de se joindre au long convoi de sa puissance. D’un mouvement gracieux, lent et majestueux, elle honora le prince et grimpa sur le carrosse royal. Délicieusement, elle déposa un baiser sur ses lèvres. Je le reconnus enfin. C’était une vision impossible. Que pouvait-il faire ici, lui aussi, mon si cher ennemi?

Il y avait si longtemps que je le combattais, que pour se défaire de moi, il avait dû m’envoyer aux confins du royaume dans l’endroit le plus sordide et le plus vil du labyrinthe. Que pouvait-elle bien faire avec lui?

Je pris une chambre à l’Hôtel des Morlentes où l’odeur du hasch n’arrivait pas à couvrir celle des nuits trop courtes au service de nymphes qui ne vous laissent jamais repartir. Mon malheur était ma seule protection. Il semblait bien qu’aucune d’elles ne pouvait m’approcher, ne pouvant pas supporter toute cette mélancolie

Labyrinthe la suite

Labyrinthe partie II

 Au cœur du labyrinthe, nous trouvons toujours les mêmes choses. Un regard oublié, une main qui s’efface, un baisé sans lendemain. J’ai découvert le sens profond des mélancolies qui tracent un pli sur son visage. Je me noie dans mes pensées carbonisées par le mépris des paroles prononcées comme un réflexe. Je t’aime, saccade ma souffrance. Martèle mon propre oubli. J’entends les lettres qui se typographient sur le vent de ses lèvres.

Nous serons contre le monde à jamais. Il n’y a plus de monde, il n’y a que le silence du vent qui tournoie.

Sur un banc dans un couloir gravé de graffitis d’artistes héroïnomanes, je regarde le temps qui s’écoule sur le sablier de l’homme aux mille regrets. L’accès se referme sur moi. J’entrevois, au loin, le baiser volé dans la nuit. Il s’évanouit, il coule sur le temps comme la crème glacée sur ses lèvres. Il devient irréel. Les larmes sèchent sur ma peau qui brûle d’amers doutes. Je suis rempli d’incertitude qui violace mon avenir. Le dessin des fantômes du néant amoureux s’affiche sur les rebords du corridor.

L’asphalte chaud transperce les semelles de mes bottes. Je marche en insomniaque. Je ne ris plus. J’effectue une boucle sur moi-même. Je suis flottant, je dérive sans autre idée que celle de m’évanouir dans les ombres. Mon cœur s’emplit d’une tristesse sans fin. Le labyrinthe m’absorbe. J’entends au loin les pas d’une sentinelle. Il semble donner desordres.

Soudain l’eau monte, torrent d’amertume grise. Elle monte aux chevilles des indolences. Elle se fiche de la présence d’êtres sur son chemin. Elle monte, elle m’aspire vers le fond. Elle est chaude, très chaude, elle bout de ma déchéance. Je dois maintenant me débattre, elle m’emporte vers un long tunnel circulaire.

Temps

Le temps qui sombre
Dans les ténébres
Avalé par les araignées
Tout évaporé
Par les idées
Dévastées
 
S’étale le long de la bordure
Comme de la confiture
Couleur sang verdure
Des arbres qui acceuillent
Les supplices éceuillent
 
Les fées ne sont plus qu’illusions
Une illustre perversion
Des sentinelles imaginations
Des sens perdus déconfits
Au milieu des convives surpris